Et si on partait à la découverte du Grand Nord canadien ? Objectif Grand Froid vous propose une sélection de livres sur le Nunavut et le Nunavik.

En premier lieu, cap vers le Nunavut grâce à l’artiste inuk Tanya Tagaq et au français Gilles Stassart. On s’envole ensuite pour le Nunavik avec des ouvrages signés Mitiarjuk Nappaaluk, Taamusi Qumaq, Nelly Duvicq, Michel Hellman, Juliana Léveillé-Trudel et Marcel Rousseau.

On rappelle que le Nunavut est le territoire fédéral du nord du Canada, bordé au sud par le Manitoba et à l’ouest par les Territoires du Nord-Ouest. Le Nunavik est quant à lui le territoire québécois situé au-delà du 55e parallèle nord.

tanya tagaq croc fenduCroc fendu de Tanya TAGAQ – Christian Bourgeois Editeur

Certains connaissent forcément Tanya Tagaq en tant que talentueuse chanteuse. Née à Ikaluktutiak au Nunavut, Tanya fait partie de ces ovnis musicaux, pratiquant le chant guttural. Grâce à ce talent et son génie hors norme, Tanya Tagaq a collaboré avec plusieurs artistes, dont l’Islandaise Björk.

Côté disques, Tanya comptabilise à son actif pas moins de 4 albums dont les somptueux « Sinaa » (« bord » en inuktitut), « Animism » et « Retribution ».

Également peintre et photographe, l’artiste inuk a publié en France en mars 2020 son tout premier roman. Intitulé « Croc fendu », ce livre nous plonge au cœur du Nunavut, à la fin des années 1970. C’est ici, dans ce territoire isolé du nord du Canada, frappé par la rudesse de la nature et du froid, mais aussi par le mépris dans lequel sont tenus ses habitants – les inuits – qu’une adolescente grandit. Elle connaît l’amitié, l’amour parental, l’art du camouflage et de la survie. Elle connaît aussi l’ennui et l’intimidation. Les ravages de l’alcool, la violence sourde, la menace des hommes, le courage d’aimer les petites peurs. Elle connaît le pouvoir des esprits.

« Croc Fendu » relate l’histoire d’une fille qui devient femme, en s’appropriant son corps, sa culture, sa voix. Ce premier somptueux roman signé Tanya Tagaq mêle descriptions hallucinées et plongées intimistes. Ce portrait d’une héroïne inoubliable nous pousse à reconsidérer la différence entre le bon et le mauvais, l’animal et l’humain, le réel et l’imaginaire.

grise fiord livre gilles stassartGrise Fiord de Gilles STASSART – Editions du Rouergue

Journaliste et cuisinier, le français Gilles Stassart est aussi écrivain et comptabilise plusieurs livres à son actif. Avec « Grise Fiord », l’auteur s’attaque pour la première fois au genre policier. Pour ce faire, Gilles Stassart a choisi d’installer l’intrigue de son roman à Iqaluit, capitale du Nunavut. C’est ici que Guédalia quitte le centre pénitentiaire où il était incarcéré. Mais une fois sorti, il retrouve ses démons familiers, l’alcool et la défonce. Son frère aîné se bat pour les droits des autochtones. Mais Guédalia a tout perdu de l’ambition qui l’a mené jusqu’à Montréal où il n’a jamais terminé ses études. Pour se sauver lui-même et fuir la tragédie qu’il aura lui-même provoquée, il n’aura pas d’autre solution que de remettre son pas dans celui des anciens chasseurs.

Grise Fiord est aussi le nom d’une communauté inuk localisée sur la pointe sud de l’île d’Ellesmere, au Nunavut. Pendant longtemps, Grise Fiord a été la communauté la plus septentrionale du Canada.

Sanaaq Mitiarjuk Nappaaluk livreSanaaq de Mitiarjuk Nappaaluk – Editions Stanké

C’est un incontournable de la littérature Inuit du Canada. Artiste renommée, Mitriarjuk a reçu en 1999 le prix national d’excellence de la Fondation nationale des réalisations autochtones. En 2004, elle a reçu l’Ordre du Canada des mains de la gouverneure générale Adrienne Clarkson.

Pour mieux comprendre l’importance de ce livre, il faut remonter le temps jusqu’en 1931, date à laquelle Mitriarjuk Nappaaluk voit le jour dans un igloo dans la région de Kangirsujuaq, au Nunavik, le nord du Québec.

Mitriarjuk n’est jamais allée à l’école et apprend, à 20 ans, l’écriture syllabique inventée par des missionnaires. Dans les années 1950, ce petit bout de femme écrit donc le premier roman inuit : « Sanaaq ». Publiée en 1983 dans une édition en syllabique, cette œuvre est restée jusqu’à aujourd’hui inconnue du grand public. Pour autant, avec un seul roman publié, Mitriarjuk est LA romancière du Nunavik.

« Sanaaq » nous plonge véritablement dans la culture et les coutumes inuites (chasse, pêche, cueillette, adoption, croyances…) à travers les yeux d’une Inuit. On y suit les heurs et malheurs de cette héroïne, avant et après l’arrivée des premiers Blancs en terre Inuit.

Je veux que les Inuit soient libres de nouveau de Taamusi Qumaq – Editions PUQ / Collection Jardin de givre

Taamusi Qumaq (1914-1993) est une figure incontournable dans le Grand Nord canadien. Il reste l’un des grands penseurs du Nunavik et défenseurs des droits autochtones et de la culture inuk.

Chasseur, pêcheur, trappeur et homme politique, Taamusi Qumaq a consacré sa vie à consigner, à l’écrit, la vie des siens ainsi que leur langue. Son travail a d’ailleurs été reconnu par plusieurs institutions, dont l’Assemblée nationale du Québec.

Son autobiographie, intitulée « Je veux que les Inuit soient libres de nouveau », est un document rare et important. Les Inuits trouveront en lui un modèle. Les lecteurs du monde entier découvriront, grâce à ses mots, un univers culturel fascinant.

Avec une introduction de Louis-Jacques Dorais, professeur à l’Université Laval. Ce livre est publié en collaboration avec l’Institut culturel Avataq.

Histoire de la littérature inuite du Nunavik de Nelly Duvicq – Editions PUQ / Collection Droit au Pôle

Aujourd’hui installée à Ivujivik, Nelly Duvicq a obtenu un doctorat en études littéraires à l’Université du Québec à Montréal en 2015. Son sujet de thèse portait sur les écrits du Nunavik de 1959 à nos jours et sur les conditions d’émergence d’une littérature inuite. Depuis 2007, Nelly Duvicq participe à de nombreux travaux de recherche et d’édition visant à promouvoir le patrimoine littéraire du Nunavik.

La plupart d’entre nous connaissent peu le contexte culturel inuit contemporain. Cet essai de Nelly Duvicq doit donc être vu comme une opportunité de comprendre l’émergence d’une littérature jusqu’ici peu connue. C’est aussi l’occasion de partir à la découverte d’auteurs qui dévoilent une vision du monde inédite sur le Nunavik, le Québec, le monde inuit et l’Arctique.

Les Inuits du Nunavik Marcel Rousseau livre EssaiLes Inuits du Nunavik. D’hier à demain. Territoire, histoire et société : un aperçu critique, de Marcel ROUSSEAU – Les éditions GID

Derrière cet essai de 582 pages, on retrouve Marcel Rousseau. Après un doctorat en psychologie des personnes au travail avec une spécialisation en ergonomie cognitive et performance humaine à l’Université de Montréal, l’auteur a enseigné dans plusieurs universités, dont l’Université Laval et l’Université du Québec. C’est entre 2005 et 2011, qu’il part s’installer au Nunavik pour son travail. Dans ce grand nord québécois, il y développe sa sensibilité et ses idées sur la question des Autochtones.

Avec « Les Inuits du Nunavik », Marcel Rousseau revient sur ce fascinant peuple. Ce livre « vise à informer, à faire réfléchir et, le cas échéant, à transformer nos paradigmes, c’est-à-dire à modifier nos perceptions, nos croyances et nos valeurs concernant les Inuits et leur contexte de vie » résument les éditions GID.

Six chapitres composent cet essai, couvrant l’ensemble du « monde inuit » du Nunavik. Au final, « Les Inuits du Nunavik » nous offre une meilleure compréhension de la société actuelle et une approche de ses potentiels de transformation. Par ailleurs, 75 photographies noir et blanc et 107 figures et tableaux illustrent ce livre.

Nunavik bd HellmanNunavik de Michel HELLMAN – Editions Pow Pow

Michel Hellman, auteur de bande-dessinée québécois, devait terminer un livre intitulé  « Mile End 2 ». Il s’est donc rendu à Kuujjuaq, Kangiqsujuaq, Kangirsuk puis Puvirnituk… pour revenir de son voyage avec un livre baptisé « Nunavik ».

Dans cette formidable BD, où il se dessine sous les traits d’un ours, Michel Hellman nous fait découvrir le Grand Nord du Québec et les habitants qui y vivent. Des habitants dont l’existence semble parfois méconnue auprès de certains Québécois bien qu’ils vivent dans le même pays.

Nirliit juliana léveillé trudelNirliit de Juliana LEVEILLE-TRUDEL – Editions La Peuplade

« Nirliit » est le tout premier roman de Juliana Léveillé-Trudel. Née à Montréal en 1985, cette auteure pratique l’écriture dramatique. Dans « Nirliit », Juliana Léveillé-Trudel nous transporte au Nunavik. Une zone qu’elle connaît particulièrement bien puisqu’elle y travaille depuis 2011 dans le domaine de l’éducation.

« Nirliit » nous relate l’histoire d’une jeune femme du Sud, souvent amenée à voyager jusqu’à Salluit. Cette dernière parle à Eva, son amie du Nord disparue, dont le corps est dans l’eau du fjord et l’esprit, partout. Le Nord est dur et la missionnaire aventurière se demande «comment on fait pour guérir son cœur». Elle s’active, s’occupe des enfants qui peuplent ses journées, donne une voix aux petites filles inuites et raconte aussi à Eva ce qu’il advient de son fils Elijah, parce qu’il y a forcément une continuité, une descendance, après la passion, puis la mort.

A travers « Nirliit », Juliana Léveillé-Trudel nous livre un puissant récit d’amour et d’amitié, à la fois beau et rude.