Inuit, Samis, Nénètses, Dolganes, Tsaatan, Aïnous… Tous ces peuples du froid ne parlent pas la même langue, portent des tenues traditionnelles différentes, et vivent dans des zones géographiques parfois très éloignées les unes des autres. Pourtant, ces peuples autochtones ont bien plus de points communs qu’on ne l’imagine.

Par exemple, ils vivent tous en harmonie avec la nature et dans le respect total de leur environnement ; un environnement aujourd’hui menacé de plein fouet par le réchauffement climatique et l’industrialisation qui ne cesse de gagner du terrain.

Ces peuples du froid partagent également un triste et lourd passé. Ils ont tous connu une quasi sédentarisation forcée, ont été interdits de parler leur langue pendant de nombreuses années. Ils ont été contraints d’abandonner leurs croyances, leurs rites et coutumes. Ils ont été victimes de violences, de racisme… Mais malgré toutes ces difficultés et ces atrocités, ces peuples autochtones du froid ont réussi à survivre et à préserver leur unité. Aujourd’hui, tous se battent pour une véritable reconnaissance. Beaucoup réaffirment avec force et fierté leurs origines et tentent de faire (re)découvrir leur très riche culture notamment à travers l’art sous toutes ses formes…

Ce petit guide dédié à la littérature et au cinéma autour des peuples du froid vous donne quelques idées pour mieux entrevoir et comprendre l’histoire des peuples de l’Arctique (Inuit, petits peuples du nord, Samis) mais aussi des Tsaatan en Mongolie ou encore des mystérieux Aïnous au Japon.

Les Inuit du Canada et de l’Alaska

Peuples du froid : notre sélection de livres et films

Les Inuit sont certainement considérés comme l’un des peuples autochtones les plus connus de l’Arctique, en raison du célèbre film documentaire ‘Nanouk l’Esquimau’ (‘Nanook of the North‘). Réalisé par Flaherty en 1922, ce long-métrage relate la vie traditionnelle d’un Inuit du Canada.

Mais les Inuitles gens » en langue inuktitut. Le singulier étant Inuk), sont rattachés politiquement à quatre nations. Ils sont ainsi 1 200 Yuit en Sibérie, 44 000 Iñupiat et Yupik en Alaska, 30 000 Inuit au Canada et 50 000 Kalaallit au Groenland.

Et c’est au Canada que la reconnaissance territoriale du peuple Inuit a été la plus importante. Le 1er avril 1999 est ainsi créé le Nunavutnotre terre ») : un territoire autonome d’environ 2 millions de km² et rassemblant 38 000 habitants (85% d’Inuit) en 2019.

Depuis, la majorité des Inuit canadiens ont leur propre gouvernement (dans le respect de la Constitution canadienne), un droit de propriété sur 350 000 km² de terre – dont 36 000 incluent des droits sur les minéraux -, un droit de chasse, de pêche et de co-gestion sur le reste du territoire. Pour plus d’infos sur les relations entre le Canada et les Inuit.

Comme beaucoup de leurs voisins autochtones de l’Arctique, la plupart des Inuit du Canada et de l’Alaska se sont sédentarisés, abandonnant (pour une grande majorité sous la contrainte) leur igloo pour des maisons en bois, leur kayak pour des bateaux à moteur ou encore leur harpon et chiens de traîneau au profit de fusils et de motoneiges.

Notre sélection de livres : 

Sanaaq Mitiarjuk Nappaaluk livreSanaaq de Mitiarjuk Nappaaluk – Editions Stanké

C’est un incontournable de la littérature Inuit du Canada. Artiste renommée, Mitriarjuk a reçu en 1999 le prix national d’excellence de la Fondation nationale des réalisations autochtones. En 2004, elle a reçu l’Ordre du Canada des mains de la gouverneure générale Adrienne Clarkson.

Pour mieux comprendre l’importance de ce livre, il faut remonter le temps jusqu’en 1931, date à laquelle Mitriarjuk Nappaaluk voit le jour dans un igloo dans la région de Kangirsujuaq, au Nunavik, le nord du Québec.

Mitriarjuk n’est jamais allée à l’école et apprend, à 20 ans, l’écriture syllabique inventée par des missionnaires.

Dans les années 1950, ce petit bout de femme écrit donc le premier roman inuit : « Sanaaq ». Publiée en 1983 dans une édition en syllabique, cette oeuvre est restée jusqu’à aujourd’hui inconnue du grand public. Pour autant, avec un seul roman publié, Mitriarjuk est LA romancière du Nunavik. « Sanaaq » nous plonge véritablement dans la culture et les coutumes Inuit (chasse, pêche, cueillette, adoption…) à travers les yeux d’une Inuit. On y suit les heurs et malheurs de cette héroïne, avant et après l’arrivée des premiers Blancs en terre Inuit.

Le harpon du chasseur de Markoosie Patsauq – Editeur : PUQ

Autre incontournable de la littérature inuk : « Le Harpon du chasseur » de Markoosie Patsauq est paru en 1969. Il s’agit d’ailleurs du tout premier roman inuk publié au Canada, symbolisant le passage historique de l’oralité vers une littérature inuite écrite. Le livre a été traduit dans pas moins de 12 langues dont le français.

Décrit comme un roman complexe et noir, le lecteur est plongé dans l’univers violent et hostile de l’Arctique, dans lequel le héros de Markoosie Patsauq, confronté à la mort de ses proches, ne trouvera d’issue que par le suicide.

Devenu par la suite un fervent militant des droits pour son peuple, Markoosie Patsauq s’est éteint le 8 mars 2020 à l’âge de 78 ans, à son domicile d’Inukjuak, au Québec. Par ici pour en savoir plus sur Markoosie Patsaug.

Je veux que les Inuit soient libres de nouveau de Taamusi Qumaq – Editeur : PUQ

Figure de la culture Inuk, Taamusi Qumaq (1914-1993) était à la fois chasseur, pêcheur, trappeur et homme politique. Il est encore à ce jour considéré comme l’un des grands penseurs des Inuit du Nunavik. Né dans un camp de chasse non loin d’Inukjuak, sur la côte orientale de la baie d’Hudson, Taamusi Qumaq porte sur le monde qui l’entoure un regard personnel et réfléchi.

Avec cette autobiographie, « Je veux que les Inuit soient libres de nouveau », Taamusi Qumaq nous propose un document rare et important, tant pour les Inuit qui trouveront en lui un modèle, que pour les lecteurs du monde entier qui accèdent par ses mots à un univers culturel fascinant.

Inuit Résistants d'Anne PELOUASLes Inuits résistants ! d’Anne PELOUAS – Editions Ateliers Henry Dougier

Ce petit livre est une très bonne porte d’entrée pour mieux comprendre la culture et les traditions des Inuit, du Nunavut et du Nunavik. Anne Pélouas, journaliste indépendante, correspondante pour le journal Le Monde au Canada, nous fait partager sa passion pour le Grand Nord canadien et ceux qui l’habitent.

A travers des interviews et de nombreuses documentations, Anne Pélouas nous en dit plus sur le quotidien de ce très riche peuple, aussi bien dans le domaine politique qu’économique, culturel ou social.

Elle y questionne par exemple Peter Taptuna, Premier Ministre du Nunavut de novembre 2013 à 2017, mais aussi Hyper T, une figure montante de la scène musicale au Nunavut, Norman Vorano, professeur en arts visuels et cultures indigènes des Amériques au département des arts de l’Université Queen’s, en Ontario, sans oublier Sheila Watt-Cloutier, considérée pendant longtemps comme « LA figure de proue du militantisme inuit au Canada et sur la scène internationale« .

I am Inuit de Brian ADAMSI am Inuit de Brian ADAMS et Julie DECKER – Editions Benteli

Le photographe Brian Adams, qui appartient à la tribu des Iñupiat, a parcouru l’Alaska depuis 2015 afin de documenter la manière dont les Inuit abordent le XXIe siècle.

Visitant une vingtaine de communautés, il a réalisé de très nombreux portraits, enregistré les histoires qu’on lui racontait et publié ces documents sur les réseaux sociaux. Ce projet baptisé ‘I am Inuit‘ se complète désormais de ce très bel ouvrage où l’on en découvre plus sur la vie de ces Inuit d’Alaska au XXIe siècle.

Le but ? Démonter les stéréotypes et mieux comprendre les Inuit d’Alaska ainsi que la complexité du monde arctique.

Inukshuk, l’homme debout de Hervé LE TELLIERInukshuk, l’homme debout de Hervé LE TELLIER – Editions Le Castor Astral

Le 1er avril 1999 est né le Nunavut, un État grand comme quatre fois la France et peuplé seulement de 22 000 habitants à l’époque.

L’ensemble de ce livre intitulé ‘Inukshuk, l’homme debout‘ se construit autour d’une correspondance. Lui part pour oublier un drame intime. Elle tente de lui faire retrouver le chemin du retour.

Le résultat est un récit émouvant, puissant, où texte et vidéogrammes se rencontrent et se renforcent pour parler de la vie, de cet oubli nécessaire qui triomphe de tout.

Hervé Le Tellier est également l’auteur de ‘Sonates de Bar‘, ‘Les amnésiques n’ont rien vécu d’inoubliable‘ ou encore ‘Joconde jusqu’à cent’.

Pour la création des vidéogrammes, Hervé Le Tellier s’est associé au plasticien Jean-Baptiste Decavèle. Sa passion pour le pays inuit l’a fréquemment entraîné en Arctique. Leur collaboration a donné naissance à un film vidéo homonyme, présenté à l’occasion de la naissance du Nunavut.

Nunavik bd HellmanNunavik de Michel HELLMAN – Editions Pow Pow

Michel Hellman, auteur de bande-dessinée québécois, devait terminer un livre intitulé ‘Mile End 2‘. Il s’est donc rendu à Kuujjuaq, Kangiqsujuaq, Kangirsuk puis Puvirnituk… pour revenir de son voyage avec un livre baptisé ‘Nunavik‘.

Dans cette formidable BD, où il se dessine sous les traits d’un ours, Michel Hellman nous fait découvrir le grand nord du Québec et les habitants qui y vivent. Des habitants dont l’existence semble parfois méconnue auprès de certains Québécois bien qu’ils vivent dans le même pays.

Notre sélection de films : 

nanouk esquimauNanouk l’Esquimau de Robert J. FLAHERTY – 1922

Ce film du réalisateur Robert J. Flaherty est considéré comme l’un des premiers documentaires de long-métrage.

A travers la vie de Nanouk (qui signifie « ours » en inuktitut), de sa femme Nyla, et de leurs enfants Allee et Cunayou, Robert J. Flaherty nous fait découvrir la vie très rude des Inuit du Grand Nord canadien, sur la baie d’Hudson, au début du XXe siècle. En perpétuelle quête de nourriture, on découvre Nanouk en pleine chasse et pêche. On le retrouve aussi lors de la fabrication du fameux igloo…

C’est un incontournable cinématographique qui vous fera vivre une immersion garantie dans le Grand Nord au plus près des Inuit du Canada !

Atanarjuat La légende de l’Homme rapideAtanarjuat, La légende de l’Homme rapide de Zacharias Kunuk

Atanarjuat, La légende de l’Homme rapide‘ est le tout premier film Inuit sorti en France en février 2002.

Primé à Cannes et récompensé par la Caméra d’Or, il raconte l’histoire d’une petite communauté d’Inuit nomades en proie au mal, qui a pris la forme d’un chaman inconnu.

Vingt ans plus tard, deux frères s’imposent pour défier le mal : Amaqjuaq, l’homme fort, et Atanarjuat, l’homme rapide. Ce dernier gagne la main de la ravissante Atuat au détriment d’Oki, le fils prétentieux du chef du campement, qui jure de se venger. Celui-ci tend alors une embuscade aux deux frères dans leur sommeil et tue Amaqjuaq, tandis qu’Atanarjuat s’échappe miraculeusement en courant nu vers l’horizon qui surplombe la glace de mer printanière. Mais échappera-t-il à ce tourbillon de vengeance ?

Les Inuit du Groenland

Peuples du froid : notre sélection de livres et films

C’est bien au Groenland que la communauté Inuit est la plus importante (plus de 50 000 habitants), avec les Kalaallit de la côte ouest et les Ammassalimiut de la côte est.

Comme leurs voisins Inuit du Canada, la plupart des Inuit du Groenland ont abandonné leurs méthodes ancestrales de chasse et de pêche pour des méthodes plus modernes. Le pays s’ouvre également de plus en plus au tourisme et certaines villes comme Ilulissat deviennent très attractives aux yeux des européens.

Fait marquant pour les Inuit du Groenland; en 1979, les Kalaallit obtiennent un gouvernement autonome. De nombreux noms de villes alors danois sont rebaptisés en Inuit. La capitale Godthåb devient Nuukcap » ou « presqu’île ») tandis que Jakobshavn devient Ilulissat.

Après une autonomie renforcée en 2009, le pays souhaiterait désormais obtenir son indépendance totale. Une indépendance appuyée par Jean Malaurie qui a publié en octobre 2019, pour le magazine Geo, un magnifique plaidoyer intitulé ‘Amis Inuits, résistez !‘.

Notre sélection de livres : 

derniers rois de thulé Jean MalaurieLes derniers rois de Thulé de Jean MALAURIE

Depuis toujours, Jean Malaurie (premier Français à avoir atteint, le 29 mai 1951, le pôle géomagnétique Nord en traîneau à chiens) nous fait partager son amour pour les Inuit du Groenland. Il a, pendant des années, vécu à leurs côtés, écouté leurs légendes mais aussi leurs récits dramatiques d’expéditions au pôle avec Peary, Cook, leurs fameuses expéditions avec Knud Rasmussen…

Au fil du temps, Jean Malaurie est devenu l’interprète de la grandeur de leur civilisation. A travers ce magnifique ouvrage, on se sent devenir militant en découvrant que cette société du pôle, d’esprit chamanique, qui vivait durement mais heureuse et libre depuis des millénaires, est agressée par une gigantesque base nucléaire. Se pose alors le problème universel de la défense des minorités traditionnelles.

Preuve de sa renommée, ce livre a été traduit en vingt langues, et adapté, à deux reprises, à la télévision française.

Minik, l’Esquimau déraciné de Kenn Harper – éditions Pocket Terre Humaine

Avec « Minik, l’Esquimau déraciné », l’auteur canadien Kenn Harper revient sur l’histoire tragique et poignante de Minik.

En 1897, le jeune Minik, son père et quatre autres Inuit du Groenland rejoignent les États-Unis après avoir accepté l’invitation du célèbre explorateur américain polaire, Robert Peary. Très rapidement, quatre des invités de l’American Museum of Natural History, à New York, décèderont des suites d’une tuberculose foudroyante. Minik, âgé seulement de huit ans, deviendra alors orphelin, avant d’être adopté par un administrateur du Muséum. Plus tard, Minik découvrira, dans une vitrine du Muséum, le squelette étiqueté de son père dont il croyait pourtant avoir assisté aux funérailles. Une découverte qui le bouleversera à jamais. Sa haine pour l’establishment new-yorkais et surtout pour Peary, s’amplifiera et il n’hésitera pas à alerter la presse…

Né en 1945 à Newmarket, dans l’Ontario au Canada, Kenn Harper a été instituteur en 1966 dans les écoles de Baffin avant de partir vivre, pendant deux ans, au nord du Groenland.

9782226153784-jCe paradis de glace – Avec les Inuits du Groënland de Gretel EHRLICH – Editions Albin Michel

Gretel Ehrlich a partagé l’existence des Inuit du Groenland, où les capacités d’endurance et la force psychologique sont souvent mises à rude épreuve.

A travers ce livre, elle nous initie à leur intimité familiale, sociale ou chamanique, à leur réalité contemporaine, et explore la relation très particulière qu’ils entretiennent avec le monde naturel.

Dans ce portrait émouvant et sensible d’un peuple endurci et fier, l’auteure de ‘La Consolation des grands espaces‘ nous invite à un parcours initiatique hors du commun.

Du Groenland au Pacifique du Knud RASMUSSENDu Groenland au Pacifique de Knud RASMUSSEN – Edition Interfolio

Kunupaluk : c’était le nom donné à Knud Rasmussen par les Inuit. L’explorateur et anthropologue Danois avait réussi à créer avec les Inuit du Groenland une réelle et forte complicité.

Knud Rasmussen a été le premier européen à franchir le passage du Nord- Ouest en traîneau à chiens. Mais Rasmussen a aussi et surtout réalisé un incroyable et précieux travail de terrain dévoilant la spiritualité authentique du peuple inuit.

Ce livre est un très beau recueil de coutumes, contes, mythes et légendes rendu des premières découvertes fossiles de la préhistoire esquimaude. Mais c’est aussi le vibrant récit d’une traversée de tous les territoires habités par les Inuit.

de_pierre_et_d_os_-_couvertureDe Pierre et d’Os de Bérengère COURNUT – Editions Le Tripode

Du Groenland à l’Arctique Canadien en passant par la Sibérie, voilà une belle porte d’entrée pour découvrir les cultures du peuple Inuit, où la nature domine les Hommes.

Ce roman d’apprentissage est également un véritable hymne à la vie et à la femme. On y découvre le pouvoir des femmes, les stratégies sociales et les rites pour permettre les grossesses tel que l’échange des conjoints…

Le chant et le chamanisme tiennent un rôle important dans la société traditionnelle
Inuit, et rythment une bonne partie du récit. Des chants très inspirés de ceux
récoltés par des explorateurs et ethnologues tels que Knud Rasmussen ou Paul-Emile
Victor.

A travers ce roman, l’auteure nous sensibilise également sur l’arrivée de l’homme
blanc colonisateur qui a changé les habitudes de vie des Inuit. Un débat très actuel
autour de l’appropriation culturelle des peuples autochtones.

Ultima Thulé MalaurieUltima Thulé de Jean MALAURIE – Editions du Chêne

Thulé : 5 lettres pour désigner le comptoir le plus septentrional de la Terre, situé sur la côte occidentale du Groenland. Un endroit très reculé que Jean Malaurie connait bien. Un lieu mystérieux que l’ethno-historien et géographe a vu évoluer au fil des années.

À la fois terrible et fantastique, ‘Ultima Thulé‘ revient sur l’histoire des illustres explorateurs qui, depuis le XVIIIe, ont précédé Jean Malaurie sur la route du pôle Nord.

S’appuyant sur des extraits des journaux de bords des explorateurs, mais aussi sur les témoignages des Inuit, des photographies anciennes et contemporaines, gravures, objets, ou encore dessins, cet ouvrage constitue une galerie fabuleuse sur des hommes hors du commun.

Lettre à un Inuit de 2022Lettre à un Inuit de 2022 de Jean MALAURIE – Editions Fayard

« Voici bientôt soixante ans que je parcours l’Arctique, du Groenland à la Sibérie, ses immenses déserts glacés habités par des sociétés ancestrales au destin héroïque.
Adressée aux citoyens du grand Nord, cette lettre est un cri d’alarme : Résistez mes amis ! En n’acceptant l’exploitation des richesses pétrolières et minières de l’Arctique qu’avec votre sagesse. L’Occident est mauvais et nous avons besoin de vous. Le matérialisme nous conduit à notre perte.
Puisse le citoyen inuit de 2022 voir le rêve des explorateurs se réaliser : un pôle non pollué où régnera un humanisme écologique. Il est urgent de reconnaître la prescience des peuples premiers et de prendre enfin humblement conscience que leur volonté obstinée de respecter cette nature ne fait pas d’eux des retardataires, mais des précurseurs. Telle est la force de leur pensée sauvage. »

A travers ce  petit livre, le célèbre géo-ethno-historien Jean Malaurie nous livre un vibrant appel et pointe du doigt, avec un regard angoissé, la disparition d’une part de l’intelligence humaine et de ses mystères.

Rêve d'un Groenlandais livre Mathias StorchLe Rêve d’un Groenlandais de Mathias STORCH

Tourné vers l’avenir du Groenland, dans un « rêve » qui ouvre à la fois sur les inquiétudes de ses citoyens et sur l’utopie d’une société égalitaire, ce premier roman de la littérature groenlandaise – Sinnattugaq, d’abord publié à Copenhague en 1914, puis traduit en danois par le célèbre Knud Rasmussen l’année suivante – permet au lecteur d’aujourd’hui de renverser son regard sur le monde inuit et de découvrir enfin une voix « de l’intérieur », qui recentre la représentation sur cette immense île de l’Arctique.

Ce roman progressiste revendique pour les Groenlandais savoir, éducation et reconnaissance.

Notre sélection de films : 

film GroenlandUne Année Polaire de Samuel COLLARDEY

Anders, qui doit bientôt se consacrer à l’exploitation de la ferme familiale au Danemark, décide au contraire de s’éloigner en partant exercer le métier d’instituteur dans un tout petit village de 80 âmes sur la côte est du Groenland. Il ne reçoit pas l’accueil qu’il attendait; les habitants le regardent comme un colonisateur venu leur enlever leur langue et leurs traditions. Les enfants ne veulent rien écouter et ne le respectent pas en cours… La grande majorité d’entre eux ne vivent pas chez leurs parents, incapables de s’en occuper mais chez leurs grands-parents qui, souvent, revendiquent l’absentéisme scolaire pour partir chasser et pêcher.

Le déracinement fera évoluer le regard d’Anders qui se retrouvera rapidement confronté aux pires difficultés et qui comprendra qu’il a tout intérêt à s’adapter au mode de vie de cette communauté qui a déjà un pied dans la modernité.

Film Groenland

Anders et les habitants de Tiniteqilaaq jouent ici leur propre rôle. Faut-il parler d’un film documentaire ou d’une fiction ? Probablement les deux. Le film nous conte le Groenland, à travers la vie d’un tout petit village, la rudesse des conditions climatiques, les traditions, légendes et croyances des anciens. Les paysages et scènes grandioses se succèdent : aurores boréales, sorties en chiens de traîneau, sessions pêche entre les icebergs… On découvre le petit village de Tiniteqilaaq au cours des quatre saisons : des tempêtes de l’hiver au bleu du ciel qui se reflète dans les eaux l’été. On ne pourra pas s’empêcher de faire le rapprochement avec le livre du danois Flemming Jensen, IMAQA. Lui aussi dénonçait les ravages de la colonisation du Groenland par le Danemark.

Coffret DVD de Jean MALAURIE la Saga des Inuit Les derniers rois de ThuléCoffret DVD de Jean MALAURIE : la Saga des Inuit / Les derniers rois de Thulé

Jean Malaurie a suivi et filmé pendant trente ans, du Groenland à la Sibérie, les Inuit, peuple premier brutalement propulsé dans les temps modernes. Il retrace cette histoire poignante et dénonce les politiques dramatiques pour l’avenir des Inuit et l’avenir de la planète qui se mettent en place.

Ce coffret DVD se compose de la série documentaire ‘La saga des Inuit‘ (remontages de 2007 – 4 x 52 min), réalisée à partir des 10 précédents films de Jean Malaurie, tournés entre 1969 et 1976. Cette série retrace l’évolution de la condition du peuple Inuit. Commentaires d’époque et analyses actuelles se mêlent. Des images sublimes des films ethnographiques et des images contemporaines de la vie « moderne » des Inuit s’enchaînent, pour nous faire découvrir ce peuple du grand nord : sa civilisation, les différentes manières dont il a traversé l’époque contemporaine selon qu’il se trouvait en Sibérie ou au Canada et son avenir.

Egalement dans ce coffret, on retrouve ‘Les derniers rois de Thulé‘. Tourné en 1970 et remonté en 2003, il s’agit du premier film ethnographique sur les esquimaux.

Les peuples de Sibérie

Peuples du froid : notre sélection de livres et films

Nénètses, Aléoutes, Tchouktches, Dolganes, Evenks, Koryaks… Les peuples autochtones de Sibérie, également baptisés les petits peuples du Nord, sont tellement nombreux qu’il serait difficile de tous les énumérer. Il faut dire que la Sibérie est vaste et regorge de nombreux trésors naturels.

Auparavant chasseurs, pêcheurs mais aussi cueilleurs selon la localisation géographique de chacun, ces petits peuples de la Sibérie Arctique fascinent toujours autant. Si certains se sont totalement sédentarisés, d’autres tentent de préserver du mieux que possible leurs us et coutumes ancestrales.

Comme nous le confiait le photographe Xavier Xelot, les Nénètses, vivant principalement dans la Péninsule de Yamal, restent l’un des derniers véritables peuples nomades éleveurs de rennes de Russie.

Aujourd’hui, tous ces petits peuples du Nord sont défendus par le RAIPON : l’Association des peuples autochtones du Nord, de la Sibérie et de l’Extrême-Orient de la Fédération de Russie. Il s’agit d’un organisme non gouvernemental russe, fondé en 1990, dont le but est de protéger les droits de l’Homme et de promouvoir les intérêts de ces nombreux peuples autochtones.

A ces petits peuples, s’ajoutent également les Sakha (anciennement les Yakoutes) qui disposent de leur propre République au sein de la Russie. Connus pour être des chasseurs d’élan, éleveurs de chevaux et de bovins, les Sakha constituent l’un des peuples de Sibérie les plus nombreux.

Notre sélection de livres : 

Arctica Malaurie Volume 2Arctica – Volume 2, Tchoukotka 1990, de Lénine à la Pérestroïka de Jean Malaurie

Ce volume, second de la série Arctica consacrée aux travaux de recherche de Jean Malaurie, tente de réfléchir sur l’histoire et les conséquences de la mise en oeuvre d’une politique d’autonomie des peuples autochtones en Sibérie du Nord, depuis Lénine et Staline jusqu’à la Pérestroïka de Mikhaïl Gorbatchev.

Il s’appuie sur les travaux de la mission historique Tchoukotka 1990 conduite sous la direction scientifique de Jean Malaurie, première expédition franco-soviétique entreprise dans ce berceau de la civilisation esquimaude.

Le chamanisme fait l’objet d’une attention particulière avec l’exploration du site majeur de l’Allée des baleines, véritable Stonehenge sibérien du XIVe siècle.

La dernière partie de cet ouvrage en retrace l’évolution, de sa genèse à nos jours, avec une nouvelle étape en cours : la création à Saint-Pétersbourg du Centre arctique franco-russe Arthur Tchilingarov – Jean Malaurie.

Cet ouvrage collectif, qui rassemble trente-huit auteurs français, russes, belges et américains à travers cinquante-neuf articles (inédits et rééditions), constitue un chapitre essentiel pour comprendre ce qu’était l’Union soviétique, sa volonté et sa politique d’autonomie autochtone. La défense des intérêts sacrés des peuples racine est un enjeu contemporain pour le peuple russe, comme pour l’ensemble de l’humanité.

Au bord du monde WendlandtAu Bord du Monde. Une vagabonde dans le Grand Nord Sibérien d’Astrid Wendlandt – Editions Robert Laffont

Partez à la rencontre des Nénètses grâce à la Franco-Canadienne Astrid Wendlandt.

Touchée dès le premier abord par la force de vie de ce peuple, l’auteure a décidé d’approfondir son enquête.

Certes, la folie des grandeurs soviétique a cherché à coloniser ces terres sauvages : les prisonniers des camps ont construit des villes, routes et chemins de fer menant au bord du monde, au précipice.

Ces nomades, dont l’auteur a partagé la vie de longs mois durant, vivent un quotidien d’un autre âge organisé autour du tchoum, leur tente en peau de renne. Été comme hiver, ils suivent les transhumances de leurs troupeaux de rennes. La générosité, la simplicité de ce peuple, ses croyances et ses coutumes ancestrales laissent à penser avec émotion qu’il reste quelques endroits sur terre où la beauté, la magie et le sacré sont encore à portée de main.

Nenetses de SibérieNénètses de Sibérie : Les Hommes debout de Jean-Pierre THIBAUDAT et Franck DESPLANQUES- Editions du Chêne

Les Nénètses vivent dans le grand nord de la Russie, aux confins de la Sibérie polaire. Dans cet environnement hostile, le quotidien, l’adaptation poussée à l’extrême, deviennent un art où chaque détail a son importance : la matière d’un objet, la couleur d’une fourrure, une trace dans la neige…

Après quinze années de voyages réguliers à l’écoute des éleveurs de rennes, des pêcheurs, des chasseurs et des habitants des villages les plus isolés, le photographe Franck Desplanques nous livre images et témoignages, comme un hommage à ces hommes et à ces femmes qui, malgré la dureté de leur quotidien, les drames de leur vie, sont debout et fiers de vivre sur leur terre.

Sibérie litteratureL’étrangère aux yeux bleus de Iouri RYTKHEOU – Editions Babel

C’est en juin 1947, qu’Anna Odintsava, jeune ethnographe russe, se rend à Ouelen, village de Sibérie au bord du Détroit de Béring, avec l’ambition de rédiger une thèse sur le peuple tchouktche. Banquise, neige, hummocks et arêtes de glace : le décor est planté ! Prête à tout pour connaître les Tchouktches, elle épouse Tanat, le premier homme qu’elle a rencontré, et part vivre avec lui au sein de sa tribu dans la toundra.

On découvre dans ce roman ethnographique la vie rude et décalée d’un peuple nomade éleveur de rennes : tannage des peaux, cuisine, protection contre le froid, chamanisme, musique… C’est avec grand plaisir que l’on s’imprègne de toute la richesse de cette culture préservée. Mais on assiste également à la montée de la menace communiste sur ce mode de vie nomade. Un sujet de réflexion sur l’autorité stalinienne qui tente d’imposer un modèle économique de collectivisation ainsi qu’une pensée unique écrasant ainsi les anciennes cultures. A noter que Youri Rykyheou est lui-même issu de ce peuple nomade Tchouktche.

omruvié éleveurs de rennesÉleveurs de rennes de Omruvié – Editions Autrement

Jamais, dans l’histoire des Tchouktches, un éleveur de rennes ne s’était perdu. Comment expliquer, alors, la disparition soudaine de Maravié ?

Omruvié, en racontant la vie des éléveurs de rennes, renoue avec la mémoire et la langue de son peuple aujourd’hui menacé.

A travers ce récit il évoque, de façon sobre et émouvante, le destruction des plus vieilles traditions tchouktches par les plans de collectivisation soviétique.

Les Peuples du Grand Nord de Valentina Gorbatcheva et Marina FedorovaLes Peuples du Grand Nord de Valentina Gorbatcheva et Marina Fedorova

Esquimaux, Samoyedes, Kouriaks sont des peuples divers unis par un point commun : le Grand Nord, avec ses immensités neigeuses, son désert blanc et sa rigueur hivernale.

Regroupés autour du feu, protégés des intempéries par la glace de l’igloo et les peaux de bêtes, les peuples du Nord agrémentent cependant leur existence par l’exploitation optimale des ressources naturelles et le développement de rituels sophistiqués.

A l’occasion des longues soirées d’hiver, des contes et des histoires enrichissent l’imaginaire de ces peuples et donnent naissance à une culture injustement méconnue.

A travers cet ouvrage, Valentina Gorbatcheva et Marina Fedorova, chercheurs au Musée d’Ethnographie de Saint-Pétersbourg, livrent un témoignage bien vivant, et donnent la parole à ces peuples dont le mode de vie traditionnel est menacé par la colonisation et la recherche effrénée des richesses minérales.

Les-derniers-peuples-des-glacesLes derniers peuples des glaces – Francis LATREILLE – Editions Gallimard

Le photographe Francis Latreille est allé à la rencontre de ces derniers peuples nomades des glaces. Il a accompagné ces ethnies du Grand Nord au cours de la transhumance de leurs troupeaux de rennes dans la toundra, à la chasse ou encore à la pêche… Partageant leur quotidien, leur isolement effroyable et la rudesse des mois polaires, le photographe rend, à travers cet ouvrage, un très bel hommage aux Dolganes, Nénètses, Tchouktches, Yakoutes, Sâmes, Koriaks, Inuit du Groenland et du Nunavut.

Les lecteurs de Youri Rytkheou, de Jørn Riel et les admirateurs d’explorateurs tels que Jean Malaurie, Paul-Emile Victor ou Knud Rasmussen retrouveront leur âme d’aventuriers devant ces extraordinaires clichés ! Une véritable déclaration d’amour à ces peuples et à leur culture à travers de sublimes clichés de sourires, de rennes, de danseurs, de chanteurs, et de tambours de chaman.

Mais sous les effets du changement climatique, ces peuples qui vivent de manière traditionnelle voient leur environnement directement impacté et leur écosystème bouleversé. Le réchauffement fait resurgir des mammouths congelés dans le pergélisol de la péninsule de Yamal, alors que les jeunes refusent ce mode de vie ancestral… la vie dans ces conditions extrêmes sera bientôt du passé. On pense notamment à cette photo d’embouteillage de quads devant un supermarché d’un petit village du Nunavut… Ces peuples recherchent un moyen de résister aux effets de ces changements, sinon de s’en accommoder.

Notre sélection de films :

Lapsuy et LehmuskallioCoffret DVD de Lapsuy et Lehmuskallio

Ils sont LES réalisateurs qui ont su rendre hommage aux fameux peuples nomades du grand froid. On pense aux Tchouktches mais aussi et bien sûr aux Nénètses, ces éleveurs nomades de rennes installés dans la Péninsule du Yamal, en Russie.

Anastasia Lapsuy, d’origine Nenet, et le Finlandais Markku Lehmuskallio, mariés dans la vie, réalisent ensemble depuis 20 ans des films qui sont la chronique de l’histoire et la vie quotidienne des divers peuples de Sibérie, du Groenland, du nord du Canada et de Scandinavie.

Dans ce très beau coffret DVD, on retrouve quatre films visionnaires qui alertent sur les dangers de la disparition de ces peuples du grand nord ayant pour cause la sédentarisation plus ou moins forcée par l’empire soviétique et la culture mondialisée et aseptisée.

Considéré comme le plus connu du couple, ‘Sept chants de la toundra‘ nous raconte sept légendes tirées du folklore Nenet, dévoilant ainsi l’histoire de cet incroyable peuple du Grand Nord; de son adaptation à des conditions de vies extrêmes et sa résistance des années vingt à nos jours. ‘Sept chants de la toundra‘ est le premier long-métrage en langue autochtone Nenet.

On retrouve aussi dans ce coffret le film documentaire ‘Fata Morgana‘ qui nous entraîne sur la côte du Détroit de Bering à la rencontre des Tchouktches, mais aussi ‘Neko, dernière de la lignée‘, où la jeune Neko, enfant du peuple nomade des Nénètses, vit au rythme des saisons en plein cœur de la toundra avec sa grand-mère et son père. Comme beaucoup, Neko va être arrachée à sa famille pour être éduquée dans un internat à la gloire du parti soviétique.

Enfin, ‘Nedarma, le voyage perpétuel‘ nous fait voyager dans la toundra du Grand Nord dans un film très poétique.

Aga Milko LazarovÁga de Milko LAZAROV

Pour ce  film, le réalisateur bulgare Milko Lazarov s’est envolé pour la Iakoutie. Située dans le Nord de la Sibérie, il s’agit de l’une des régions les plus froides du monde, mais aussi l’une des plus belles, avec ses steppes enneigées à perte de vue.

C’est ici que vivent Nanouk et Sedna, un couple de nomades Inuits, entourés uniquement de leur chien fidèle. Nanouk s’adonne à la pêche et à la chasse tandis que Sedna s’attèle à la conception des filets de pêche et au tannage des peaux de renards arctiques. Ces scènes, à la fois belles et contemplatives, nous permettent de rentrer progressivement dans leur vie de nomades, totalement isolés du reste du monde. On a particulièrement apprécié ces plans où Milko Lazarov filme le ciel et la terre au point de les confondre pour n’en faire qu’un.

Mais derrière l’immersion dans la vie de ce couple d’Inuits, Ága dépeint une émouvante chronique familiale, défendue à merveille par les deux principaux protagonistes, Mikhail Aprosimov et Feodosia Ivanova.

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Les conversations entre les deux acteurs se font rares par moment, mais qu’importe. Nul besoin de dialogues pour ressentir l’émotion qui se lit sur les visages, à travers les regards échangés.

L’émotion est à son paroxysme sur la scène finale tournée dans l’hallucinante mine de diamants à ciel ouvert de Mirny. Une mine gigantesque montrant la percée de la civilisation et de l’industrialisation au beau milieu de cette nature que l’on pensait préservée. Une mine menaçant considérablement les peuples nomades et leur mode de vie ancestral.

Le livre de la Toundra d’Alekseï VAKHRUSHEVLe livre de la Toundra d’Alekseï VAKHRUSHEV

À 72 ans, Alekseï Voukvoukaï vit au cœur de la Tchoukotka, en Russie. Véritable homme de la toundra, il doit son existence à l’élevage du renne. Sa communauté, qui gère un troupeau de plus de 14 000 têtes, mène un combat permanent pour la survie et le bien-être de tous dans les contrées les plus inhospitalières.

Le film offre une immersion totale dans la vie des éleveurs de rennes de Tchoukotka, aux confins de la Sibérie, et fait découvrir leur culture et leur mode de vie.

Le spectateur séjourne chez des hommes qui luttent pour préserver des traditions ancestrales au bord des fleuves Rytchvan, Palïavaam et Pyrakvaam.

Réalisateur, scénariste et producteur de films documentaires, Alekseï Vakhrushev a grandi à Anadyr, la capitale de la Tchoukotka. Diplômé du VGIK à Moscou en 1991, il s’intéresse au destin des Peuples du Nord.

Les Sames en Laponie

Peuples du froid : notre sélection de livres et films

Comme beaucoup de peuples autochtones de l’Arctique, les Samis ou Sames étaient chasseurs et pêcheurs. Souvent considérés comme la dernière communauté autochtone d’Europe, les Samis vivent sur un territoire d’environ 400 000 km², situé au-dessus du cercle polaire entre la Laponie norvégienne, et la presqu’île de Kola en Russie, en passant par le nord de la Suède et de la Finlande. Ils seraient environ aujourd’hui 100 000 (60 000 en Norvège, 30 000 en Suède, 10 000 en Finlande et 2 000 en Russie).

Malgré la sédentarisation de la plupart des Samis, ce peuple autochtone du nord de l’Europe reste connu pour l’élevage transhumant de rennes. Pour autant, seul 10% des Samis pratiquent l’élevage de rennes.

Contrairement à d’autres peuples du Grand Nord, les Samis sont reconnus depuis 2007 par l’ONU comme un peuple autochtone. Ils possèdent d’ailleurs leur propre drapeau, leur hymne et une langue divisée en neuf dialectes. Leur journée nationale est célébrée le 6 février.

Les Samis de Finlande, de Suède et de Norvège possèdent également leurs assemblées respectives (la Norvège a été le premier pays à instituer un Parlement Sami en 1989). Un poids politique qui leur permet d’alerter et de protester sur des questions cruciales comme notamment les exploitations minières à Kiruna en Suède, menaçant considérablement leurs territoires ancestraux.

Notre sélection de livres :

dernierlaponLe Dernier Lapon d’Olivier TRUC – Editions Points

Mattis, un éleveur de rennes, a été assassiné près de son gumpi, ses oreilles tranchées et marquées telles celles d’une bête. Dans le musée de la ville de Kautokeino, un tambour chaman a disparu. Deux affaires distinctes ou une seule enquête ? Chargés d’enquêter, Klemet, unique sami de la police des rennes, et Nina venue du sud de la Norvège, doivent faire équipe.

Derrière l’enquête policière, on découvre le monde fascinant des Sames: les gumpis, les chanteurs de joïks, les chamans, l’élevage des rennes, le respect des traditions…

L’action se situe au mois de janvier, moment où le soleil refait son apparition pour quelques minutes seulement, après quarante jours de nuit polaire éclairée par les aurores boréales. La neige, le froid, l’obscurité, voilà ce qu’affrontent les éleveurs de rennes sur le vidda.

Ce polar nous révèle aussi la sombre histoire de la colonisation suédoise de la Laponie du 17ème siècle. Ils pillent les ressources naturelles et mettent de force les Samis à contribution pour les travaux des mines. Ils sont évangélisés et donc forcés à renoncer à leurs traditions, leurs croyances et leurs légendes.

Litterature BDEt pour les passionnés de bande-dessinées, on ne peut que vous conseiller de découvrir ‘Le Dernier Lapon‘ en version BD signée Javier Cosnava et Toni Carbos (éditions Sarbacane).

Malgré quelques grosses coupes inévitables du roman d’Olivier Truc, cette bande dessinée est une adaptation réussie du polar d’origine.

On a tout de suite accroché avec les illustrations. Le choix de la bichromie retranscrit parfaitement l’atmosphère glaciale du récit. Ambiance cotonneuse, vastes étendues neigeuses, motoneiges, rennes… Toni Carbos rend à merveille ce paysage de vidda sous la nuit polaire de la fin janvier.

Laponie-LatarjetLaponie de Raymond LATARJET

Laponie est un carnet de voyage retraçant le périple de trois jeunes français partis de Paris en voiture pour rejoindre la Laponie à l’été 1939. Raymond Latarjet est accompagné de son frère Michel et de leur très bon ami Paul-Emile Victor ! Le but de cette mission est bien évidemment de dresser une étude ethnologique du peuple nomade vivant en Laponie norvégienne, finlandaise et suédoise.

Découverte des fjords, traversées en bateau, longues marches, rencontres avec les rennes, sessions de pêche dans les lacs et rivières, échanges avec les Lapons… Bref, c’est LE récit qui nous a donné envie de partir découvrir la beauté de la Laponie !

La situation tendue en Europe et la signature du Pacte Germano-soviétique, le 23 août 1939, ne leur permettra pas de prolonger leur voyage ethnographique…

Notre sélection de films :

Sami-une-jeunesse-en-Laponie-afficheSami, une jeunesse en Laponie d’Amanda KERNELL

Pour son premier long-métrage intitulé ‘Sami, une jeunesse en Laponie‘, Amanda Kernell a choisi de soulever la sombre histoire coloniale de la Suède. Un grand flash back nous plonge dans les douloureuses années 1930 d’avant-guerre.

Nous voici dans une famille de nomades, éleveurs de rennes. Les deux filles doivent partir au pensionnat pour y recevoir une éducation suédoise. Elle Marja, l’aînée, y trouvera le désir d’émancipation et reniera ses racines pour essayer de s’intégrer à la société bourgeoise de Suède, bien plus au sud, à Uppsala.

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Parmi les scènes marquantes, on pense à cette visite de l’anthropologue, venu étudier les caractéristiques faciales des enfants Samis, qui se termine par l’humiliation de la photo. Il y a aussi le terrible moment où Elle Marja se fait marquer à l’oreille, comme un renne, par le groupe de jeunes garçons sur le chemin de l’école…

Le manque total de bienveillance de la jeune fille pour ses racines et de compassion pour les siens est encore plus dévastateur que le regard des autres.

Un bel hommage à tous ceux qui ont été victimes de racisme et qui ont eu le mérite de réagir. Car oui, il y a aussi du courage dans la fuite de cette jeune fille.

Les peuples de Mongolie

Peuples du froid : notre sélection de livres et films

La Mongolie attise la curiosité de beaucoup grâce à l’immensité de ses steppes mais aussi grâce à ses peuples nomades qui ne cessent de forcer l’admiration.

Bien que ces peuples ne vivent pas en Arctique, ils subissent des hivers très rudes. Doit-on rappeler que Oulan-Bator est la capitale la plus froide du monde ? Résultat, de nombreux éleveurs nomades perdent chaque année une partie de leur bétail, menaçant considérablement leur façon de vivre.

Parmi les peuples nomades incontournables de Mongolie, citons bien sûr les Khalkhas, les plus nombreux. Vivant essentiellement en Mongolie centrale et inférieure, ils sont semi-nomades, et dépendant de l’élevage et de l’agriculture.

Les fameux et charismatiques aigliers kazakhs de Mongolie sont installés eux sur la chaîne de l’Altaï. Chaque automne, ils se réunissent dans la province de Bayan Olgii pour le très réputé festival de dressage des aigles. Épreuves, démonstrations, jeux, chants, danses… le festival des aigliers est une véritable philosophie.

Enfin, comment parler des peuples de Mongolie sans évoquer les Tsaatan ou Doukha. Installé dans la taïga mongole, au nord du pays, ce peuple nomade éleveur de rennes rassemble aujourd’hui quelques dizaines de familles vivant dans la province du Khövsgöl.

Originaires de Sibérie, ils sont considérés comme les derniers à vivre de l’élevage de rennes dans cette région de la Mongolie. Mais là encore, leur mode de vie est menacé en raison de la diminution du nombre de rennes, mais aussi de l’industrialisation. Et contrairement aux autres peuples de Mongolie, ils ne vivent pas dans des yourtes ou ger mais dans des tipis (Tipee).

Notre sélection de livres : 

esprits de la steppe corinne sombrunLes Esprits de la steppe de Corine Sombrun – Editions Albin Michel

Corine Sombrun rencontre Enkhetuya, chamane du peuple Tsaatan, au nord de la Mongolie, à l’orée des années 2000. Cette femme à la personnalité exceptionnelle, qui vit encore dans un univers autarcique où, de génération en génération on élève des rennes et on respecte les esprits de la nature, va lui transmettre un enseignement millénaire fait de rites et de cérémonies, gardiens de l’harmonie du monde.

Tout en évoquant l’enfance d’Enkhetuya, née en 1957 en pleine taïga, son dur apprentissage de chamane dans une République populaire qui en interdit la pratique, ce récit passionnant retrace l’histoire d’un peuple de nomades qui a vécu comme à l’aube de l’humanité pour basculer il y a peu dans l’ère du marché planétaire.

Corine Sombrun appartient à cette lignée rare d’écrivains qui placent l’esprit humain et ses facultés largement inexploitées au cœur de leur recherche, poursuit ici une quête initiée avec le ‘Journal d’une apprentie chamane‘ et ‘Sur les pas de Geronimo‘.

littérature MongolieCiel Bleu de Galsan TSCHINAG – Editions Métailié

Galsan Tschinag est un auteur mongol qui nous raconte ici ses souvenirs d’enfance dans les steppes. Un regard de petit enfant plein d’émerveillement sur cette vie de transhumance nomade auprès de ses parents, ses frères et sœurs, sa grand-mère d’adoption, et son fidèle chien.

Mais la vie n’est pas tendre avec les éleveurs de Mongolie. Outre leurs dures conditions de vie, ils doivent aussi se plier au régime soviétique, scolariser les enfants en ville… Heureusement, son chien l’aidera à oublier ses soucis d’enfant…

C’est un joli conte qui nous fait voyager en Mongolie et nous fait découvrir le quotidien parfois rude de ce peuple nomade. Une enfance totalement différente de ce que nous connaissons en France, où l’enfant occupe très tôt un rôle proche de celui de l’adulte…

Premier ouvrage publié en 1994 en Allemagne, ‘Ciel bleu‘, a obtenu le prix Adalbert von Chamisso, récompensant un auteur étranger écrivant en allemand.

Notre sélection de films : 

Aishoplan film MongolieLa Jeune fille et son aigle d’Otto BELL

Dresseur d’aigle est un métier réservé aux hommes en Mongolie et se transmet de père en fils. Depuis sa plus tendre enfance, Aishoplan (que nous avons eu la chance de rencontrer à Oulan Bator lors du Eagle Hunting Festival du mois de mars) assiste son père qui entraîne les aigles. Pour ses 13 ans, elle décide, avec l’aide de son père, d’adopter un aigle et de l’entraîner à la chasse aux renards dans le but ultime de participer au Eagle Hunting Festival d’Ulgii, où se mesurent les meilleurs.
Parviendra-t-elle à briser les codes de la tradition et à se faire accepter par les anciens ?

Documentaire fascinant et poignant ! Des paysages magnifiques, une photographie superbe et une belle immersion dans le dur quotidien, été comme hiver, de ses chasseurs fauconniers. On s’attache très rapidement à la joyeuse Aishoplan qui n’a pas froid aux yeux et n’a qu’un souhait : devenir la première femme fauconnier, égale de l’homme.
On en ressort bouleversé avec la furieuse envie d’aller à la rencontre de ce peuple nomade.

Les Aïnous d’Hokkaido au Japon

Il n’existe que très peu d’ouvrages et de reportages consacrés à la culture Aïnou. A vrai dire, un certain mystère a toujours entouré ce peuple autochtone, installé principalement sur l’île d’Hokkaido au Japon. D’autres vivent encore au sud de Sakhaline et du Kamtchatka, ainsi que sur les îles Kouriles. Comme pour de nombreux autres peuples autochtones, la vie des Aïnous s’organisait autour de la chasse, de la pêche, de la cueillette, ou de rituels religieux consacrés aux kamui, esprits et dieux présents dans tout être vivant.

Comme le souligne la Maison de la culture du Japon à Paris, le peuple Aïnou a petit à petit disparu, notamment en raison de la colonisation de l’île de Hokkaido, puis « l’assimilation forcée » sous l’ère Meiji.

Depuis les années 1960, le peuple Aïnou se bat pour une réelle reconnaissance de sa culture. En février 2019, le Japon a officiellement proposé un projet de loi pour reconnaître les Aïnous en tant que peuple «indigène» de l’archipel. Un combat de longue haleine rendu notamment possible grâce à la persévérance de Shigeru Kayano, écrivain militant et premier Aïnou à siéger au Sénat en 1994, avec l’appui de l’ONU.

Autre avancée, le sud d’Hokkaido doit inaugurer au printemps 2020, juste avant les Jeux Olympiques de Tokyo, le tout premier musée et parc national du peuple aïnou.

Notre sélection de livres : 

Une aventure des Rônins Zenta et Matsuzo, Tome 6 L'ours des AïnousUne aventure des Rônins Zenta et Matsuzo, Tome 6 : L’ours des Aïnous de Lensey NAMIOKA – Editions du Rocher

Lensey Namioka est une célèbre auteure de livres pour adolescents et enfants. Parmi ses incontournables, on retrouve la série créée autour des Rônins (samouraïs sans maître) Zenta et Matsuzo. Et le tome N°6 s’intéresse plus particulièrement à la culture Aïnou.

Lensey Namioka nous fait ainsi voyager au Japon, au XVIe siècle. On y retrouve Zenta et Matsuzo sur un bateau qui, pris dans une tempête, fait naufrage sur la côte d’une île habitée par le fameux peuple des Aïnous. Soignés et nourris par ces indigènes aux yeux ronds, les deux rônins vont devoir prendre part à la vie et aux tâches quotidiennes de la tribu – y compris à l’effrayante fête de l’Ours, également appelée la « cérémonie Iyomante« . Mais, comprenant bientôt qu’ils sont retenus prisonniers par leurs hôtes, les deux compères décident de s’enfuir pour rejoindre une colonie japonaise située de l’autre côté de l’île. Hélas, Zenta et Matsuzo ne sont pas au bout de leurs peines : ils apprennent que les colons japonais s’apprêtent à faire la guerre au peuple aïnou, accusé d’avoir dressé un ours féroce à les attaquer. En désaccord sur le camp qu’ils doivent défendre, les deux amis seront-ils contraints de se battre l’un contre l’autre ?

Voilà une façon plutôt originale d’évoquer la culture du très discret peuple des Aïnous et de mieux cerner leurs us et coutumes.

Un Voyage chez les Aïnous Hokkaïdo 1938Un Voyage chez les Aïnous : Hokkaïdo 1938 de Arlette LEROI-GOURHAN et André LEROI-GOURHAN – Editions Albin Michel

Arlette et André Leroi-Gourhan sont deux ethnologues qui décident de partir, au mois de février 1937, au Japon pour une mission de deux ans et demi. A l’été 1938, les deux spécialistes s’intéressent aux Aïnous, installés sur l’île d’Hokkaïdo.

A travers cet ouvrage, on apprend que les Aïnous sont des chasseurs-pêcheurs au mode de vie encore primitif qui ignoraient le travail du métal.

Malgré la colonisation japonaise, certains Aïnous conservent encore leurs rituels, comme la cérémonie de l’ours, et leurs traditions : les femmes aïnous, aux tatouages impressionnants qui leur dessinent de larges moustaches de guerriers, se livrent aux travaux agricoles tandis que les hommes pêchent le saumon, chassent la baleine et le grand ours brun.

Considéré comme un peuple autochtone plutôt méconnu, cet ouvrage signé Arlette et André Leroi-Gourhan nous livre un témoignage inédit ainsi qu’une impressionnante étude ethnographique sur un peuple en voie de disparition, maintenant quasiment intégré au mode de vie moderne.

Bien évidemment, cette liste de livres et de films est non exhaustive. Il existe de nombreux autres ouvrages et films dédiés à ces peuples du froid. D’ailleurs, n’hésitez pas à nous faire partager les vôtres et nous dire quels sont vos favoris !

Sources :
Institut Polaire Paul Emile Victor
Océan Polaire