On dit souvent que la musique adoucit les mœurs. En cette difficile période de crise sanitaire et de confinement, on vous propose de découvrir 10 artistes inuits du Canada et du Groenland. De Willie Thrasher à Elisapie en passant par Tanya Tagaq, Riit, Small Time Giant, Kelly Fraser, The Jerry Cans ou encore Beatrice Deer… laissez-vous porter par leurs mélodies inspirantes, leurs voix de gorge si caractéristiques et leurs textes engagés.

Willie Thrasher

Certains artistes, au talent incomparable, n’ont pas eu la reconnaissance qu’ils auraient dû. C’est le cas de Willie Thrasher. Né en 1948 à Aklavik, dans les vastes territoires du Nord-Ouest, cet artiste inuit du Canada a connu une enfance difficile. Comme beaucoup de jeunes issus de sa communauté, il a été arraché à sa famille à l’âge de 5 ans, pour être placé dans les fameux pensionnats autochtones mis en place par le gouvernement canadien dans le cadre de sa politique d’assimilation.

Grâce à la musique qu’il découvre un peu plus tard, Willie Thrasher a pu renouer avec ses racines et sa culture. « Spirit Child », paru en 1981, en est le parfait exemple. Magnifique album mettant en avant la communauté inuk et amérindienne ainsi que ses coutumes et croyances, ce disque regorge de petites pépites musicales dont le titre éponyme mais aussi « Wolves don’t live by the rules ».

Aujourd’hui, Willie Thrasher est installé à Nanaimo, sur l’île de Vancouver en Colombie-Britannique. Il lui arrive encore quelques fois de jouer sur la jetée afin d’y faire résonner ses sonorités venues du Grand Nord.

Tanya Tagaq

Artiste incontournable de la scène musicale inuk, Tanya Tagaq est loin d’être une inconnue. Née à Ikaluktutiak au Nunavut, Tanya fait partie de ces fascinants artistes capables de nous captiver avec leur chant guttural. La chanteuse islandaise Björk a elle aussi été séduite par ce talent, au point de faire appel à Tanya sur l’opus « Medúlla » paru en 2004, ainsi que pour plusieurs de ses tournées.

Côté albums, Tanya comptabilise à son actif pas moins de 4 albums dont le somptueux « Sinaa » (« bord » en inuktitut). Sorti en 2005, cet opus a remporté plusieurs prix lors des Canadian Aboriginal Music Awards dont celui de la « Meilleure réalisation/production » et du « Meilleur design d’album ». En 2014, Tanya renouvelle l’exploit grâce à son opus « Animism », distingué aux Polaris Music Prize la même année, puis aux Juno Awards en 2015. Preuve de sa renommée, Tanya Tagaq a été nommée en 2016 Membre de l’Ordre du Canada.

Décrite par beaucoup comme un véritable ovni musical, Tanya est une artiste totalement à part qui mérite tout simplement le détour si vous ne la connaissez pas encore.

Elisapie

Véritable coup de cœur de la rédaction, nous avions déjà évoqué cette artiste inuit lors de son concert aux Trois Baudets à Paris. Après des débuts au sein du duo Taima, Elisapie s’est lancée dans une carrière solo en 2009 et on peut dire que cette nouvelle aventure lui va comme un gant.

Après « There Will Be Stars » et « Travelling Love », la chanteuse, originaire de Salluit au Nunavik, a publié en 2018 un album incroyablement inspirant et beau, intitulé « The Ballad of the Runaway Girl », le premier à paraître enfin en France.

S’exprimant aussi bien en français, en anglais et en inuktitut, sa langue maternelle, Elisapie nous touche au plus profond avec ce disque, qui n’oublie pas de rendre un vibrant hommage à l’histoire du peuple Inuit.

Outre plusieurs petits bijoux originaux dont « Ikajunga », « Don’t Make Me Blue » et « Una », l’artiste inuk fait aussi honneur à Willie Trasher, cité plus haut, en reprenant « Wolves Don’t Live by the Rules ».

Beatrice Deer

Beatrice Deer fait également partie de ces artistes inuits connus et reconnus au Canada. Originaire de Quaqtaq, au Nunavik, elle y a grandi avec sa mère, inuk, et son père qui appartient aux Mohawks, l’une des six nations iroquoises.

Sa force ? Un chant de gorge à vous faire dresser les poils, et son talent à mêler harmonieusement la folk, la pop et le rock, le tout chanté en anglais et en Inuktitut. Après un premier opus intitulé « Just Bea », notamment distingué aux Canadian Aboriginal Music Awards, en 2005 (prix du meilleur album culturel inuit), l’artiste attendra 5 ans avant de revenir avec un disque éponyme qui l’emmènera chanter pour les Jeux Olympiques de Vancouver. Suivront deux autres opus « Fox » en 2015 et « My All to You » en 2018.

Kelly Fraser

Aujourd’hui, son nom résonne tristement dans le monde musical. Artiste inuk, originaire de Sanikiluaq au Nunavut, Kelly Fraser s’est suicidée le 24 décembre 2019 à son domicile à Winnipeg. Elle était âgée seulement de 26 ans.

Pourtant, tout la destinait à un avenir prometteur. C’est en 2013 qu’elle commence à se faire un nom sur la toile, et notamment sur Youtube. À cette époque, elle décide de revisiter en langue inuktitut plusieurs morceaux célèbres, dont « Diamonds » de Rihanna.

Un an plus tard seulement, elle dévoile son premier opus, baptisé « Isuma ». Mais il lui faudra attendre 2017 pour voir arriver la consécration. Cette année-là, Kelly Fraser publie son second album « Sedna » (en référence à la célèbre déesse inuk de la mer). Preuve de sa renommée, le disque a été nommé aux Prix Juno de 2018, dans la catégorie Indigenous Music Album of the Year.

Mêlant pop contemporaine et sons traditionnels inuits, Kelly Fraser séduit aussi par sa voix et son implication dans la promotion des chanteuses de gorge inuites.

The Jerry Cans

The Jerry Cans font incontestablement partie des groupes connus au Nunavut et au-delà.
Originaire de la grande ville d’Iqaluit, le groupe se compose du chanteur et guitariste Andrew Morrison, de la chanteuse et accordéoniste Nancy Mike, de la violoniste Gina Burgess, du bassiste Brendan Doherty et du batteur Steve Rigby.

Mêlant chant de gorge, musique traditionnelle et country, The Jerry Cans s’expriment en anglais, mais aussi en inuktitut.

Côté albums, le groupe compte à son actif 4 opus dont « Nunavuttitut » en 2012, « Aakuluk » en 2014, ou encore « Inuusiq/Life », en 2016, produit sur le label Aakuluk Music. Pour les moins connaisseurs, sachez que cette maison de disques du Nunavut a été fondée par plusieurs membres de The Jerry Cans afin de « soutenir les musiciens inuits et autochtones ».

Dernièrement, The Jerry Cans ont publié leur quatrième album tout simplement baptisé « Echoes ».

Riit

Auteure-compositrice, interprète, mais aussi présentatrice de télévision inuk, Riit est une artiste à suivre de très près. De son vrai nom Rita Claire Mike-Murphy, Riit a commencé à se faire un nom en publiant en 2017 un premier EP en collaboration avec le groupe The Jerry Cans. Elle y dévoile sa voix solaire, mais aussi ses talents en tant que chanteuse de gorge.

Originaire de Pangnirtung, au Nunavut, Ritt fait à nouveau parler d’elle en dévoilant en 2019 son premier LP sur le label Six Shooter Record. Baptisé « Ataataga », ce disque a été nommé aux Prix Juno de 2020 pour l’album de musique autochtone de l’année. Il a aussi été présélectionné pour le prix de musique Polaris 2020. 

Mêlant musique traditionnelle et touches électroniques, Riit fait honneur à sa langue d’origine, l’inuktitut, et nous offre au final un merveilleux voyage musical.

 

Terry Uyarak

Voilà un autre artiste inuk à suivre de très près. Originaire d’Igloolik, au Nunavut, Terry Uyarak a donné naissance à son premier album solo le 30 octobre 2020. Intitulé « Nunarjua Isulinginniani » (Avant la fin du monde, en français), ce disque a été produit par Jace Lasek (Besnard Lakes, Patrick Watson, Land Of Talk).

Pour ce premier opus, pblié sur le label Aakuluk Music, l’auteur, compositeur et interprète a collaboré avec l’artiste Riit, sur l’excellent titre « Anuri ». Chantant en inuktitut, Terry Uyarak a aussi fait appel à Simon Qamaniq pour les interludes narratifs.

Les compositions font écho aux expériences personnelles de Terry en tant que mari, père et chasseur.

Avant de dévoiler ce premier opus, Terry Uyarak s’était déjà illustré dans l’univers artistique. Acteur, jongleur, musicien… il avait aussi tourné à travers la planète aux côtés de la troupe de cirque inuk ARTCIRQ

Nive Nielsen & The Deer Children

Contrairement aux artistes inuits du Canada, les musiciens inuits du Groenland sont bien moins nombreux à s’être fait un nom au-delà de leurs frontières. Pourtant, ils ont tout autant de choses à raconter et à défendre.

C’est notamment le cas de Nive Nielsen. Originaire de Nuuk, cette artiste joue et chante aux côtés de son groupe The Deer Children. Faisant dans la folk, Nive Nielson recense à ce jour deux opus, « Nive Sings! » paru en 2012 et « Feet First » sorti en 2015.

Chanteuse, Nive est également actrice. Elle a notamment été aperçue dans les films The New World, avec Colin Farrell, en 2005 ainsi que dans la saison 1 de la série The Terror.

Small Time Giant

Ce groupe groenlandais est originaire du sud du Groenland. Très vite, Small Time Giant se fait un nom dans le pays, mais aussi au Danemark. Composé de Miki Jensen (chant et guitare), de Pilu Hammeken (guitare), Jakob Skovaa (basse) et Jonas Nilsson (batterie), le groupe fait mouche grâce à un style efficace misant sur l’indie rock. Côté compositions, Small Time Giant s’inspire des histoires personnelles de chaque membre et de l’histoire tragique du Groenland.

Small Time Giant publie un premier EP en 2012, « Six Shades of Heart », avant de dévoiler un LP deux ans plus tard, baptisé « Stethoscope ». Le 30 octobre 2020, le groupe a produit un nouvel album intitulé « Formed by Mistakes ».

Le groupe est aussi à l’origine du morceau « We Are The Arctic », l’hymne des Arctic Winter Games qui se sont déroulés à Nuuk, au Groenland, en 2016.